Faut-il guérir le vieillissement ?

Le vieillissement favorise l'apparition de maladies et d'invalidités, accroît la souffrance humaine et augmente le risque de décès. 
Traiter le vieillissement devrait donc constituer une priorité pour la société. 
Toutefois, plusieurs objections à cette démarche existent. Certaines d’entre elles sont des mythes infondés qui peuvent être réfutés, tandis que d'autres soulèvent des interrogations importantes sur les plans social, philosophique et éthique. 
Voici quelques réponses aux questions et préoccupations les plus fréquentes.
Contrairement à la croyance populaire, le vieillissement n'est ni inévitable ni universel, comme en témoignent certaines espèces, telles que les homards, les sébastes et les tortues, qui ne montrent aucun signe de vieillissement.
Le vieillissement n'est donc pas une condition nécessaire à la vie.
L'humanité lutte constamment contre la nature, que ce soit par l'utilisation d'antibiotiques, de vaccins ou par l'éradication de maladies comme la variole, pour éviter des conséquences naturelles indésirables.
Pourtant, certaines personnes considèrent que prolonger la vie serait "non naturel". Cela dit, combattre le vieillissement n'est pas plus "contre-nature" que prendre des médicaments ou utiliser la technologie pour améliorer notre quotidien.
Bien que la plupart des gens ne s'opposent pas à la lutte contre les maladies associées au vieillissement, telles que le cancer, les maladies cardiaques ou neurodégénératives, certains perçoivent la lutte contre le vieillissement dans son ensemble comme problématique.
Cibler le processus de vieillissement dans son ensemble, plutôt que ses maladies et dégradations individuelles, est toutefois plus rationnel et pourrait conduire à des vies plus longues et plus saines.
Que l'on guérisse le vieillissement globalement ou en combattant ses symptômes un par un, le résultat sera le même : une intervention qui défie la nature.
Une idée fausse courante dans la recherche sur le vieillissement, appelée "erreur de Tithon", provient de la mythologie grecque où Tithon obtient l’immortalité sans jeunesse éternelle, devenant ainsi de plus en plus faible avec l'âge.
Contrairement à ce mythe, la recherche vise à prolonger la santé et le bien-être, et non la débilité liée à l’âge. L'objectif est d'allonger la durée de vie en bonne santé en retardant les maladies et la dégénérescence, et idéalement de trouver un remède au vieillissement pour éviter des pathologies comme la maladie d’Alzheimer, le cancer ou les maladies cardiaques.
Des études sur la restriction calorique montrent qu'il est possible d’allonger la durée de vie en bonne santé. Les facteurs génétiques pourraient aussi jouer un rôle clé. L’identification des gènes liés au vieillissement en bonne santé pourrait mener à des interventions médicales pour préserver la santé et prolonger la vie.
À long terme, des approches biotechnologiques pourraient potentiellement guérir le vieillissement. Selon certaines estimations, elles pourraient porter l'espérance de vie moyenne à 1200 ans, tout en maintenant un corps et un esprit jeunes, les décès étant alors dus principalement à des accidents ou des maladies infectieuses, et non au vieillissement.
L’espérance de vie a doublé au cours du siècle dernier et la qualité de vie s’est considérablement améliorée, accompagnée par l'évolution des loisirs et divers ajustements sociaux.
Un remède contre le vieillissement ne signifierait pas l’immortalité, car il resterait toujours possible de mourir. De plus, chacun conserverait la liberté de mettre fin à sa vie ou de refuser les traitements anti-âge. La liberté et le choix individuel seraient respectés, sans obligation d'accepter un tel traitement.
Actuellement, la limite de vie humaine est de 122 ans, le record de longévité connu. Avec un remède contre le vieillissement, chacun pourrait choisir de vivre 100, 200, 1 000 ans, voire davantage s’il le désire.
La question de la justice et de l'équité est souvent soulevée concernant l'allongement de la vie.
Bien qu'il soit difficile de prévoir le coût d'un éventuel remède contre le vieillissement, l'histoire montre que de nombreuses avancées médicales, initialement coûteuses et réservées à une élite, deviennent progressivement accessibles à tous grâce à la production de masse.
Refuser des traitements médicaux parce qu'ils ne sont pas accessibles à tous immédiatement serait absurde, comme cela l'est pour les stimulateurs cardiaques ou les transplantations.
Les maladies liées à l'âge deviennent aussi des causes majeures de décès dans les pays en développement, soulignant que le vieillissement n'est pas seulement un problème de pays riches.
Il est probable que guérir le vieillissement sera un processus progressif, et non une percée unique. L'histoire des grandes découvertes montre que celles-ci ne se produisent pas dans des conditions idéales, mais qu'elles finissent par bénéficier à l'humanité dans son ensemble, en améliorant la vie de tous.
Soigner le vieillissement et prolonger la vie en bonne santé apporterait des bénéfices économiques significatifs.
Aux États-Unis, l'allongement de la longévité entre 1970 et 2000 a généré une valeur économique estimée à 3,2 billions de dollars par an, grâce à une productivité accrue et à des coûts de santé réduits.
À l'avenir, des améliorations en matière de santé pourraient encore accroître ces avantages. Actuellement, les dépenses de santé liées aux personnes âgées augmentent à mesure que leur proportion croît dans la population mondiale, créant un fardeau financier.
Traiter le vieillissement permettrait non seulement de vivre plus longtemps, mais aussi de travailler plus longtemps, augmentant ainsi la productivité et réduisant les coûts de santé associés au déclin physique lié à l'âge.
Lorsqu'on envisage l'allongement de la vie, la surpopulation est souvent perçue comme un problème majeur. Cependant, malgré une population mondiale presque quadruplée au cours du dernier siècle et une durée de vie sans précédent, la qualité de vie s'est améliorée. De plus, certains pays développés, comme le Japon et plusieurs pays européens, sont confrontés à des problèmes de sous-population et de vieillissement.
Il est crucial de noter que, même avec un remède contre le vieillissement, la croissance démographique resterait plus lente que durant le « baby-boom », et il faudrait des décennies avant que les effets sur la population ne deviennent significatifs, permettant ainsi le temps nécessaire pour s'adapter.
Les préoccupations de surpopulation sont souvent exagérées, mais un traitement contre le vieillissement pourrait créer de nouveaux défis, comme une croissance démographique accélérée dans certaines régions et des impacts écologiques accrus. Il serait alors nécessaire de gérer ces défis, potentiellement par le contrôle des naissances, tout en abordant les problèmes de durabilité des ressources.
En somme, les craintes de surpopulation dues à un traitement contre le vieillissement sont exagérées. Bien que des ajustements puissent être nécessaires, ces préoccupations ne devraient pas servir de raison pour rejeter les avancées médicales qui pourraient prolonger la durée de vie.
Ce problème se pose pour toute autre avancée médicale.
Habituellement, comme pour tout médicament ou traitement, les tests débutent par des études sur des animaux, suivies d'essais sur un petit groupe de patients humains.
La sécurité et l'efficacité doivent être confirmées avant d'élargir les tests à un groupe plus vaste et de procéder à la commercialisation.
Bien que certains produits puissent contourner ces réglementations par divers moyens juridiques, cela concerne l'ensemble de l'industrie biomédicale et biotechnologique, et non uniquement la recherche anti-âge.
Depuis l'Empire romain, l'humanité a évolué de manière significative, ce qui a conduit à une vie plus longue et plus épanouissante aujourd'hui.
Un remède contre le vieillissement transformerait la société, mais rien n'indique que ces changements seraient nuisibles pour l'humanité. Tout comme les progrès passés ont rendu le monde plus agréable, un remède contre le vieillissement pourrait réduire la souffrance et améliorer la santé, rendant la vie encore meilleure.
Bien que les effets à long terme d'un tel remède soient imprévisibles et que des défis comme les inégalités intergénérationnelles et la stagnation culturelle puissent surgir, les avantages pour la société et les individus seraient considérables.
Notre monde fait face à de nombreux problèmes et injustices, notamment la guerre, la faim, la pauvreté et les épidémies dans plusieurs pays.
Ces défis sont souvent d'ordre politique plutôt que technologique ; par exemple, la faim résulte généralement de problèmes de distribution des aliments causés par la guerre, l'anarchie ou la tyrannie, plutôt que d'un manque de ressources alimentaires.
De plus, les maladies liées au vieillissement sont déjà parmi les principales causes de décès, ce qui montre que le vieillissement n'est pas uniquement un problème des pays développés.
Dans la société moderne, le vieillissement représente un problème majeur, devenant ou étant déjà la principale source de souffrance pour de nombreuses personnes. Ainsi, la lutte contre le vieillissement devrait être une priorité essentielle.
Selon les principes de bioéthique, guérir le vieillissement serait conforme au principe de bienfaisance, car cela bénéficierait aux individus sans leur nuire.
Les thérapies anti-âge pourraient améliorer de nombreuses maladies liées à la vieillesse, tandis que ne pas offrir ces traitements causerait des souffrances, en contradiction avec le principe de non-malfaisance.
Le respect de l'autonomie permettrait à chacun de choisir s'il souhaite ou non utiliser un remède contre le vieillissement. Ainsi, même avec un traitement disponible, les individus pourraient décider de continuer à vieillir s'ils le souhaitent.
Certains bioéthiciens affirment que prolonger la vie est immoral, mais étant donné l'augmentation de la longévité de 50 % au cours du dernier siècle et les efforts pour contrer les maladies, il est possible que nous vivions déjà des vies que certains pourraient juger immorales simplement parce que nous modifions le cours naturel de la vie.
Le fait que la vie ne soit pas éternelle ne diminue pas l'importance d'en améliorer la qualité et la durée.
Par exemple, nous ne nous demandons pas pourquoi nous devrions nous faire vacciner, subir des interventions médicales ou adopter des comportements prudents alors que la mort est inévitable ; ces actions visent à rendre notre vie plus agréable et plus longue.

Si les biotechnologies de rajeunissement atteignent leur plein potentiel, elles pourraient nous permettre de maintenir une jeune santé tout au long de notre vie.
Il est préférable de vivre une existence longue et en bonne santé plutôt qu'une existence courte et pleine de maladies.
En fin de compte, même si l'univers est destiné à mourir, vivre en bonne santé jusqu'au bout est une meilleure option que de vivre dans la maladie.
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